Les 3 mesures phares de la proposition de loi Nogal

Article rédigé par Lucie LE RAY, le 28 janvier 2020.

Le député LREM Mickaël Nogal

En se basant sur les 37 recommandations du rapport « Louer en confiance » qu’il a remis en juin 2019, le député Mickaël Nogal a présenté le 14 janvier dernier un projet de loi comportant trois grandes mesures visant à améliorer les rapports entre bailleurs et locataires.

 

LA LIMITATION DU NOMBRE DE GARANTS

 

La première proposition du député Nogal interviendrait en amont du contrat de location. Elle prévoit que les propriétaires ne pourront plus exiger à leurs locataires plus d’un garant.

 

L’objectif de cette mesure est de limiter les abus parfois rencontrés. Certains candidats à la location se voient ainsi demander jusqu’à quatre garants, notamment dans les villes comme Paris où le marché est particulièrement tendu, avec une demande très largement supérieure à l’offre.

 

Exiger un nombre élevé de garants peut être discriminant pour les candidats à la location. S’il est déjà difficile pour un candidat à la location de trouver quatre personnes s’engageant pour lui, la tâche est encore plus ardue pour ceux issus de milieux modestes. Le député Nogal souhaite ainsi limiter les obstacles à la location en mettant fin à ce qu’il estime être une discrimination sociale.

 
 
 

LA MISE SOUS SÉQUESTRE DU DÉPÔT DE GARANTIE

 

La deuxième mesure phare du projet de loi Nogal concerne la restitution du dépôt de garantie. C’est l’une des principales sources de conflit entre propriétaires et locataires : elle fait l’objet de près de deux tiers des actions intentées en justice par les locataires.

 

Les torts sont souvent partagés avec, d’un côté, des propriétaires qui encaissent le chèque du dépôt de garantie, et de l’autre, des locataires qui prennent l’initiative (totalement illégale, rappelons-le) de ne pas payer leur dernier mois de loyer, par crainte de ne pas se voir restituer leur dépôt de garantie.

 

Le projet de loi du député Nogal propose que le chèque de garantie (abusivement appelé « caution ») soit déposé auprès d’un intermédiaire professionnel de l’immobilier qui le mettrait sous séquestre, empêchant ainsi le propriétaire de l’encaisser.

 

Ce chèque serait ensuite restitué au locataire « sur la base d’un accord commun » entre ce dernier et son bailleur, selon les termes de Mickaël Nogal. Le député espère ainsi, par cette proposition, favoriser la communication entre les deux parties au moment de la conclusion – souvent source de conflits, comme évoqué plus haut – du contrat de location.

 

La consignation du dépôt de garantie pourra aisément s’appliquer dans le cas où le propriétaire fait appel à un professionnel de l’immobilier pour mettre son bien en location (c’est même déjà souvent le cas). Mais la future loi irait plus loin, et c’est ce qui fait grincer quelques dents chez les professionnels de l’immobilier : le député Nogal souhaite en effet que le dépôt de garantie soit systématiquement mis sous séquestre, y compris dans le cas d’une location de particulier à particulier.

 

Le professionnel chargé de consigner le dépôt de garantie devra être choisi par le locataire. Il pourra tout aussi bien être un agent immobilier ou un administrateur de biens. Si rien n’est encore défini concernant le coût de la prestation, le député Nogal souhaite qu’elle soit gratuite pour le locataire.

 
 
 

LE VERSEMENT DU LOYER PAR LES AGENCES IMMOBILIÈRES

 

Mais les propriétaires ne seront pas perdants avec la loi Nogal. En contrepartie des deux mesures citées plus haut, le projet de loi comporte une troisième proposition majeure ayant pour but de rassurer le propriétaire quant à d’éventuels loyers impayés.

 

Comme chacun le sait, il existe déjà pour cela les garanties loyers impayés : le propriétaire souscrit une assurance qui lui permettra, en cas de loyer(s) non réglé(s) par son locataire, de percevoir quand même les montants qui lui sont dus.

 

La loi Nogal suggère une variante : le professionnel immobilier pourra proposer un mandat garantissant au propriétaire le paiement de son loyer. Ce sera alors au professionnel de verser le loyer au propriétaire et donc de s’assurer contre les éventuels impayés de loyers du locataire.

 

Le député Nogal estime que cette solution, qui permettra aux propriétaires lésés d’être immédiatement payés, est plus avantageuse que les garanties déjà existantes qui obligent les propriétaires à attendre parfois plusieurs mois avant de percevoir leurs loyers impayés.

 

Par ailleurs, les agences seraient également en charge du paiement des réparations en cas de dégradations commises par les locataires.

 

Il est à noter que ce mandat serait facultatif : les agences seraient libres de le proposer et les propriétaires pourraient décliner cette option. Le député Nogal souhaitait initialement la rendre obligatoire, mais il a changé d’avis devant les objections des acteurs de l’immobilier qui craignaient que certains d’entre eux n’aient pas la capacité financière d’assumer cette charge. Les professionnels devront toutefois informer les bailleurs de l’existence de cette possibilité.

 

Deux propriétaires sur trois louent directement de particulier à particulier, mais 70% d’entre eux seraient prêts à passer par une agence immobilière si cette dernière leur garantissait le versement du loyer chaque mois, d’après différentes études. C’est ce qui a incité le député Nogal à faire cette proposition de loi, qui pourrait ainsi permettre aux professionnels de l’immobilier d’acquérir de nouveaux clients.

 
 
 

UN PROJET DE LOI QUI NE FAIT PAS L’UNANIMITÉ

 

Si la limitation à un seul garant semble obtenir l’adhésion de l’ensemble de la profession, les deux autres mesures rencontrent beaucoup plus d’oppositions.

 

Les objections à la consignation du dépôt de garantie

 

L’Union Nationale des Propriétaires Immobiliers (UNPI) estime qu’il y a trop peu de litiges liés à la restitution du dépôt de garantie (environ 7 000 contentieux sur 175 000 par an) pour justifier la création d’une loi spécifique à ce cas.

 

De plus, certains professionnels regrettent le caractère obligatoire de cette proposition de loi, qui forcera les propriétaires souhaitant traiter directement entre particuliers à faire tout de même appel à un professionnel, dans un marché où deux tiers des baux sont signés de particulier à particulier. Cette mesure contraindra également les locataires à effectuer des démarches complexes pour trouver à qui confier le dépôt de garantie.

 

Se posera par ailleurs la question de la régularisation des charges locatives en copropriété. À la fin du bail, un propriétaire peut conserver au maximum 20% du dépôt de garantie en attendant cette régularisation. Pourra-t-il toujours le faire ? Qui décidera du montant exact ? Le locataire pourra-t-il contester cette démarche ? Autant de questions actuellement sans réponses…

 

Selon une enquête du magazine 25 Millions de Propriétaires, 95% des bailleurs seraient opposés à cette mesure.

 
 

Les objections au versement du loyer par les agences immobilières

 

La première crainte liée à cette proposition concerne la trésorerie. Non seulement les professionnels devront verser immédiatement tous les loyers à leurs bailleurs, mais ils auront en plus de cela à gérer les impayés des locataires et à subir les délais de carence avant de se faire indemniser par leurs assurances.

 

Si les plus grandes structures bénéficient de suffisamment de réserves pour pouvoir assurer cette prestation, c’est loin d’être le cas des petites agences qui risquent de ne pas avoir assez de trésorerie. Les professionnels dans l’incapacité de proposer ce service pourraient ainsi perdre des clients.

 

De plus, puisqu’il s’agit d’une prestation complémentaire proposée sans obligation aux bailleurs, elle fera forcément l’objet d’un coût supplémentaire à la charge des propriétaires.

 

L’UNPI demande le retrait de cette mesure.

 
 

Les arguments de Mickaël Nogal

 

Le député à l’origine de cette proposition de loi estime qu’elle instaurera de la confiance entre les différents acteurs pouvant intervenir dans le cadre d’un bail : propriétaires, locataires, agents immobiliers, administrateurs de biens, gestionnaires locatifs, assureurs,…

 

Selon Mickaël Nogal, ajouter des intermédiaires professionnels permettra de rassurer les propriétaires, et ainsi de faciliter l’accès à la location.

 

Afin d’appuyer son propos, le député a publié sur son site un dossier de presse sous forme de bande dessinée. Pas sûr que cela suffise à convaincre ses détracteurs.

 

Le projet de loi Nogal devrait être étudié à partir du mois de mai pour une mise en vigueur au 1er janvier 2021.

 
 
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